Expériences sur la mémoire de la peur

A-L'expérience de Watson

 

 

    Nous voulions prouver qu'il existe bien une mémoire de la peur, mais nous n'avions pas les moyens suffisants dans notre lycée. Nous avons donc réutilisé une expérience réalisé en 1920 par le docteur Watson sur un jeune garçon de 11 mois, appelée communément: L'expérience du Petit Albert. Bien que très critiquée pour des raisons éthiques, cette expérience est restée néanmoins très célèbre et pertinente. Le but de cette expérience était d’appliquer les récentes découvertes sur le conditionnement classique. Elle correspondait à ce que nous voulions prouver car elle montrait, que suite à un évènement provoquant la peur, l'enfant se souvenait de la scène et ressentait cette même peur dès qu'une situation semblable se présentait.

 

Protocole:

    Tout d'abord, Watson présente à l'enfant une souris et constate que l'enfant n'en a pas peur. La souris ne semble donc pas provoquer d'elle-même la frayeur. Ensuite, le chercheur ajoute à chaque présence de la souris un bruit violent à l'aide d'une barre de métal afin que l'enfant ressente une peur. Watson répète cette opération plusieurs fois jusqu'à ce que l'enfant éprouve un sentiment de peur à chaque fois qu'il voit une souris.

    Par la suite, Watson a observé une peur extrème des animaux chez le jeune garçon. L'enfant dès qu'il était en présence de ceux-ci paniquait et parfois s'évanouissait.

 

Interprétation:

    L'enfant semble avoir associé le bruit métallique et la souris, et ressent donc la peur à chaque fois qu'il est en présence d'une souris. On peut donc penser qu'il existe bien une mémoire de la peur car l'enfant a réagi sans que le danger direct ne se présente, il s'est seulement rappelé les évènements précédents. Ainsi, le cerveau a identifié la souris comme un danger, et a transmis cette information à l'hippocampe et à l'amygdale, ce qui permet à ces deux organes de provoquer la peur afin que l'enfant puisse mieux se protéger. Par ailleurs, cette expérience nous permet de montrer que la peur peut aussi être à l'origine de pathologies, telles que des phobies, car l'enfant ressent une peur panique face à de nombreux animaux bien qu'ils ne représentent pas de danger pour lui.

 

B-Les parties du cerveau impliquées dans la mémoire de la peur

 

    Nous voulions aussi prouver l'implication de certaines parties du cerveau notamment l'amygdale et l'hippocampe dans la mémoire de la peur. Nous ne pouvions cependant pas réaliser les expériences nous-mêmes car elles impliquaient de faire souffrir un animal. Nous avons donc utilisé les résultats d'une expérience réalisée par Klüver et Bucy en 1937 .

    En effet, ces deux scientifiques avaient utilisé 30 singes qui n’avaient plus d'amygdale. Ces singes, alors mis en présence de serpents, ne ressentaient pas de peur et ne semblaient pas se souvenir qu'ils s'étaient fait mordre... Klüver et Bucy avaient donc pu en déduire que l'amygdale est impliquée dans les processus amnésiques, mais ils furent peu écoutés. 

 

    Depuis, de nombreux travaux, menés depuis une vingtaine d'années ont montré que l'amygdale intervient dans les processus de mémorisation des événements qui ont une charge émotionnelle, qu'elle soit positive ou négative. Ainsi, chez des patients ayant une lésion de l'hippocampe ou de l'amygdale, le processus de mémoire semble incomplet. Chez les individus ayant une lésion au niveau de l'amygdale pour qui un carré bleu est associé avec un choc électrique désagréable au poignet, il n'y a aucune manifestation physiologique de peur à la vue d'un carré bleu, même s'ils sont capables de se souvenir qu'un carré bleu est associé à un électrochoc. Et un patient présentant une lésion bilatérale de l'hippocampe exprime l'inverse: à la vue d'un carré bleu il manifeste une réponse conditionnée émotionnelle de peur mais est incapable de rapporter explicitement l'expérience de conditionnement passée. Ces réactions montrent bien que les deux systèmes de mémoire se complètent et que ces deux organes ont bien un rôle dans la mémoire émotionnelle.

 

    Par ailleurs, de récentes études ont montré que la protéine CREB  était impliquée dans le processus de mémoire de la peur. Cependant, ses actions n’étaient pas encore réellement définies. Le docteur Bontempi a ainsi mené une démarche expérimentale visant à introduire dans une même portion d’ADN, le gène de la protéine CREB, le gène d'une protéine fluorescente et celui d'une substance rendant les neurones sensibles à la toxine de la diphtérie. Cette expérience a été un succès car la construction s’est implantée parfaitement au fonctionnement de la souris. 

     La protéine fluorescente a permis de situer les neurones où la protéine CREB réagit, donc de repérer quels neurones de l'amygdale latérale du cerveau sont activés lors de la mémoire de la peur. Pour conclure, ce sont bien les neurones surproduisant la protéine CREB qui laissent l'empreinte d'une peur dans la mémoire.

     A long terme, cette découverte pourrait permettre de développer des traitements capables d'effacer des souvenirs traumatiques ou anxiogènes de façon sélective, notamment pour les personnes victimes d'un stress post-traumatique lié à un accident grave ou à un attentat.